Archives mensuelles : mars 2015

Bilan rénovation énergétique maison 1920

Rénovation énergétique d’un pavillon de 1920, en région parisienne.
Coûts, bénéfices et analyse critique :

État initial :

Pavillon de 1920, rez de chaussée + deux étages, surface habitable 50 m2.

  • Murs en pierre épaisseur 50cm, et en briques pleines épaisseur 20 cm, non isolés
  • Sol RDC carrelé sur terre-plein, non isolé
  • planchers 1er et 2nd étage en bois, non isolés
  • Fenêtres simple vitrage posées en feuillure
  • 2nd étage de type « grenier », sans parement sous les tuiles (charpente et tuiles visibles)
Maison de 1920, rénovée après guerre, « dans son jus »
Murs intérieurs juste plâtrés, non isolés
Étage non aménagé, non isolé

Les moyens de chauffage étaient :

  • Poêle à bûches 10KW, alimenté en briquettes de lignite et en bûches
  • 1 poêle à pétrole mobile, alimenté en pétrole distribué en grandes surfaces en bidons de 20 l
  • 1 déshumidificateur électrique + chauffant de 700 W
  • 1 radiateur électrique soufflant 1000 W pour les appoints

La consommation, le coût et les émissions de CO2 éq. étaient (consommations réelles) :

Type énergieQuantité/ancoût/an (€)KgCO2e/anÉnergie restituée dans la maison (KW.h)
Bois local (forêt Verneuil en Halatte)12 stères (4.32 tonnes)624 €considéré zéro16416 (3,8KW.h/kg) x 80% rendement poêle = 13133 KW.h
Briquettes de lignite5 paquets de 25kg55 €228 Kg *590 KW.h*
Pétrole8 bidons de 20 l232 €405 Kg *1564 KW.h*
Électricité1200 KW.h238 € (0.1587 € KW.h)60 Kg (50gCO2e/KW.h)1200 KW.h
Total/an1149 €693 Kg16487 KW.h

*données de calcul source ADEME https://www.bilans-ges.ademe.fr/documentation/UPLOAD_DOC_FR/index.htm
Poêle à bois RDC
Poêle à pétrole d’appoint

Rénovation énergétique :

La possibilité de ne pas habiter immédiatement dans la maison a permis d’envisager une rénovation énergétique totale, enveloppe complète. L’emménagement a été possible au bout de 6 mois

Options choisies :

  • Remplacement des menuiseries par des fenêtres PVC double vitrage, en applique intérieure
  • Isolation des murs par l’extérieur, plaques de polystyrène épaisseur 150mm + enduit gratté, R=3.98
  • Isolation de la toiture sous rampants, rouleaux de laine de verre épaisseur 250mm R=6.
  • Isolation du sol de RDC par plaques de polystyrène épaisseur 80mm, R=2
  • Conservation du poêle à bûches en supprimant les briquettes de lignite.
  • Installation de 5 radiateurs électriques 1000W + programmateur fil pilote
  • Installation d’une VMC simple flux
  • Conservation du ballon d’eau chaude sanitaire électrique

Coût de la partie énergétique de la rénovation :

Remplacement fenêtres8352 €Crédit d’impôts 1670 €
Isolation des murs par l’extérieur29061 €Subventions 18000 € , voir détail ci dessous
Isolation de la toiture sous rampants + placo5990 €
pose isolant sol RDC + coulage dalle béton 25 m2980 €
5 radiateurs 1000 W500 €
Total :44883 €

Nota : le bilan ci dessus n’inclut pas les cloisons intérieures, portes intérieures, carrelages, etc… Il s’agit uniquement des éléments d’économie d’énergie du chantier.

Les aides obtenues sur ce chantier sont :

  • Crédit d’impôts pour bouquet de travaux d’économie d’énergie : -3670 €
  • Aide de l’ANAH programme Habiter Mieux : 14000 €
  • Aide du conseil général de l’Oise en échange des Certificat d’Économie d’Énergie (CEE) : 2000 €
  • Obtention d’un Eco-PTZ de 20 000 € sur 10 ans, soit 166.67 € par mois.
  • TVA à 7% sur les fenêtres et l’isolation posées par un professionnel (rénovation en 2013).

Soit une charge financière de 5213 € de fonds propres, et ensuite 166,67 € par mois pendant 10 ans

Pose de l’isolation par l’extérieur, les appuis de fenêtres ont dus être rallongés
Isolation des combles sous rampant
Polystyrène au sol du RDC avant coulage de la dalle
Aspect final après isolation thermique par l’extérieur

Résultats après travaux

Les chiffres présentés ci dessous proviennent de relevés réels sur l’année 2019, à garder en tête lors de la lecture du paragraphe consacrée au Diagnostic de Performance Énergétique (DPE).

Par rapport à avant travaux, le service rendu est différent, puisque la maison fait maintenant 75m² habitables (aménagement des combles).

Type énergieQuantité/ancoût/an (€)KgCO2e/anÉnergie restituée dans la maison (KW.h)
Bois local (forêt Verneuil en Halatte)7 stères (2,52 tonnes)364 €considéré zéro9576 (3,8KW.h/kg) x 80% rendement poêle = 7661 KW.h
Électricité1500 KW.h238 € (0.1587 € KW.h)75 Kg (50gCO2e/KW.h)1500 KW.h
Total/an602 €75 Kg9161 KW.h
*données de calcul source ADEME https://www.bilans-ges.ademe.fr/documentation/UPLOAD_DOC_FR/index.htm
** données Linky de l’hiver dégrevée de la consommation de base observée l’été (hiver 2018 : 1837 KW.h, hiver 2019 : 1119 KW.h)

Par rapport à la situation initiale :

  • économie de 547 € / an sur le chauffage et eau chaude sanitaire
  • Émission de 75 KgCO2e/an au lieu de 693 Kg, l’économie a l’air importante mais en dessous de 1 tonne de CO2e/an on considère déjà que les performances sont bonnes. Ici en l’occurrence on fait passer la notation de l’étiquette climat de « B » à « A ».
  • +25 m² habitables

On constate que les économies sont assez faibles, mais le confort général de la maison a changé dans l’ensemble.
En effet, avec les chiffres « avant travaux » présentés, la maison était globalement froide, avec des problèmes d’humidité, et il ne faisait chaud que dans la pièce de vie équipée du poêle à bois. Après travaux, la maison est plus saine, et en continuant de ne chauffer que la pièce de vie comme avant (les 5 radiateurs électriques sont utilisés occasionnellement en fin de compte), il fait bon dans toute la maison.

Analyse critique

Par rapport aux résultats après travaux, on voit que, classiquement dans ce genre de rénovation lourde, les économies réalisées peuvent parfois ne jamais rembourser le coût des travaux. Ici les 44 883 €, dont 25 213 € de reste à charge, à raison de 547 € d’économie /an mettront 82 ans à s’amortir 🙂

En termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’essentiel a été réalisé en arrêtant l’utilisation du poêle à pétrole et des briquettes de lignite, ce qui aurait pu être obtenu avant la réalisation des travaux.

De même le bilan carbone de la rénovation, qui comptabilisera l’énergie grise injectée dans la maison sous forme de matériaux d’isolation et autres, et qui doit être remboursée énergiquement, n’est pas encore réalisé.

On peut constater dans ce cas que pour les logements déjà chauffés avec des moyens bas carbone, notamment le chauffage électrique, les travaux d’économie d’énergie n’améliorent pas fondamentalement le bilan carbone global. Sans avoir fait le bilan carbone de la rénovation, il est probable d’ailleurs que cette rénovation ait généré plus de gaz à effet de serre qu’elle ne va en économiser par les économies de chauffage, c’est un paradoxe.

Par rapport à l’isolation thermique par l’extérieur (ITE), la méthode utilisée, à base de panneaux de polystyrène, génère une pollution diffuse et a été assez décevante sur ce sujet.
En effet, lors de la découpe et de l’ajustage par rabotage du polystyrène, cela a généré des tempêtes de billes blanches disséminées partout. Il y en a eu dans tous les potager alentours. Comme les eaux de pluies sont dirigées vers un ruisseau à proximité, on a pu mettre des grillages juste à temps sur les regards d’égout pour limiter les déversements dans l’environnement.
En observant les ouvriers, on se rend compte qu’il n’y a pas vraiment de moyen de capter ces billes de polystyrène à la source. On ne peut pas aspirer en continu à proximité des découpes, sur un échafaudage en plus. Les filets d’échafaudage ne sont d’aucune utilité car le vent emporte tout, et en l’absence de vent les billes se collent partout par effet électrostatique.
La meilleure solution à ce problème serait que l’isolant soit biodégradable afin que les chutes disparaissent assez rapidement dans la nature.

Limites du diagnostic de performance énergétique

Le programme « Habiter Mieux » de l’ANAH implique de réaliser deux diagnostics de performance énergétique (DPE), un avant les travaux et un après. Le versement de la subvention est possible si on obtient un gain de 25% de performance énergétique à l’issue des travaux.

Le DPE effectué avant les travaux indique une consommation de 1125 KW/m²/an (étiquette énergie classée G), et une émission de gaz à effet de serre de 15 KgCO2e/m² (étiquette climat classée C)
La consommation estimée pour le chauffage est :
– 74144 KW.h de bois (équivalent à 54 stères !)
– 2211 KW.h d’électricité soit 351 € (coeficient de 2,58 appliqués aux 5704 KW.heqprimaire indiqués dans le DPE)
Coût total annuel présenté 2677 €

Le DPE effectué après les travaux indique une consommation de 437 KW/m²/an (classé F), et une émission de gaz à effet de serre de 6 KgCO2e/m² (classé B)
La consommation estimée pour le chauffage est :
– 25324 KW.h de bois (équivalent à 18,5 stères !)
– 2211 KW.h d’électricité soit 351 € (coeficient de 2,58 appliqués aux 5704 KW.heqprimaire indiqués dans le DPE)
Coût total annuel présenté 1045 €

On voit que les chiffres des DPE peuvent être farfelus, par exemple l’estimation avant travaux impliquait de brûler 54 stères de bois pendant l’hiver, ce qui n’est probablement pas possible même en entretenant les flammes de l’enfer dans le poêle toute la journée.

Le second enseignement par rapport à ces calculs théoriques et les consommations réelles enregistrées plus haut est que les occupants d’un logement ne consomment pas le chauffage en fonction de leurs besoins, mais en fonction de leur moyens. C’est à dire que dans une maison moins isolée, on aura plus froid, et dans une maison bien isolée, on cherchera à atteindre une bonne température partout avant de limiter la consommation de chauffage. Cet effet rebond pénalise en général les travaux pour économie d’énergie.